Le virus ou la mise à jour des tares sociétales

Monde – La seule et unique chose qui est inédite dans la crise actuelle du coronavirus est le comptage en temps réel du nombre de personnes contaminées, asymptomatiques ou non, hospitalisées , guéries et/ou décédées. Pour la première fois, la pandémie est vécue en direct sur l’ensemble de la planète et pour la première fois toutes les couches sociales de toutes les populations sont frappées de manière synchronisée ce qui met à jour les forces et les faiblesses de toutes les composantes de toutes les sociétés.

Le virus transcende les lois de la politique et de l’économie et transforme un monde fondé sur les inégalités en une scène théâtrale où les figurants sont amenés à tenir les premiers et seconds rôles. Grâce au coronavirus, on prend conscience que les métiers les moins valorisants s’avèrent indispensables à la survie de l’humanité. Les metteurs en scène et les chefs d’orchestre, en l’occurrence les dirigeants, sont démunis car ils n’ont ni scénario, ni baguette pour jouer la partition et comme ils deviennent esclaves de technologies qu’ils ne maîtrisent pas, ils se réfugient derrière des avis scientifiques, lesquels au nom de connaissances infuses les autorisent à prendre des mesures autoritaires. De plus ne plus d’observateurs s’inquiètent, à juste titre, de cette politique s’assimilant à des dérives qui perdurent lorsque le mal est éradiqué. Le ministre-président de Hongrie a été vivement attaqué par certains membres du Parlement Européen qui prétendent que les mesures d’exception qu’il a prises, parce qu’elles n’ont pas été assujetties à une date butoir, risque de perdurer mais ces détracteurs oublient que la plupart des dirigeants, à quelques exceptions près, agissent exactement de la même manière et tous prennent en otage leurs populations de manière autoritaire et répressive. Il est aisé de discipliner les peuples lorsque chaque écart de conduite est sanctionné par des amendes qui représentent parfois le quart des revenus mensuels du fauteur. Même si on n’est pas porteur du virus, se déplacer au-delà du kilomètre autorisé devient un délit sujet à des amendes que la logistique contentieuse post-crise se gardera bien d’oublier. A entendre tout ce qui se dit et à lire tout ce qui s’écrit, il semblerait et c’est du moins ce qui est prétendu, que ce corona serait du « jamais vu », or ce qui fait l’originalité d’un virus depuis des siècles sont les interrogations qu’il suscite quant à son origine, son évolution et à plus forte raison, son éradication. Un virus est par définition une « chose » jamais vraiment bien identifiée mais ce que l’on sait, est qu’il est toujours imprévisible et versatile.

« A mourir pour mourir… »
A ce titre, il est sujet à tous les fantasmes et lorsque sur la pandémie se greffe une « infodémie » due au progrès de sciences numériques mal encadrées et jamais régulées, on arrive à des paradoxes qui non seulement défient les lois de la raison et de la nature mais entravent nos libertés fondamentales dont le non des moindres est d’être éloigné d’un proche lorsqu’il s’apprête à nous quitter. S’il est important et crucial de donner la parole aux scientifiques, il est regrettable qu’elle soit aussi peu accordée aux historiens de la médecine qui apportent généralement des réponses lucides et des solutions crédibles car fondées sur la durée. Etant donné que nous sommes aussi démunis que l’étaient nos ancêtres et arrière-grands-parents au Moyen-Age ou au début 20ième siècle face à la peste et à la grippe espagnole et que malgré ces deux fléaux l’humanité a survécu, on peut partir du principe que les mesures prises à l’époque étaient tout sauf infondées. Au cours de ces deux périodes de crise, il n’a pas été interdit aux commerçants de commercer, aux paysans de cultiver et aux ouvriers de produire. Mettre fin à toute vie sociale sur une durée indéterminée malgré d’indiscutables avancées technologiques et scientifiques en quelques décennies est pour le moins troublant et extrêmement dangereux car le risque est grand que le virus provoque plus de victimes après que pendant la crise. Tout se passe à l’heure actuelle, comme si nous avions été éduqués pour avoir peur de la mort plutôt que pour affronter les aléas de la vie. Alors que jadis, seules les personnes touchées étaient isolées, aujourd’hui, c’est la population toute entière qui est confinée. Naturellement, il n’a pas été nécessaire d’attendre des mois pour se rendre compte que cette option est sans issue et que sans travail le monde est sans avenir. Et c’est de cette prise de conscience que jaillit toutes les imperfections de notre société. Après s’être aperçus que les 12.000 morts de la canicule n’avaient servi à rien car ce sont encore une fois les occupants de maisons de retraite qui ont été les plus touchés, on constate que les hôpitaux sont sous-équipés, que les écoles ne répondent pas aux impératifs hygiéniques et que dans les banlieues des milliers de familles vivent encore à dix dans un quarante mètres carrés. Le coronavirus permet par ailleurs d’oublier que l’an dernier plus de dix millions de personnes ont contracté la tuberculose, que plus de 700.000 sont décédées du Sida auxquelles il faut ajouter des millions de décès dus à des maladies qui ont disparu dans les pays riches mais perdurent dans les territoires sous-développés.

Distance sociale : un mètre en France mais au moins deux en Allemagne !

… je ne veux pas attendre »
Ces informations, personne ne les rappelle parce qu’elles sont dérangeantes. Il est plus facile de s’apitoyer sur les hécatombes dans les maisons de retraite que de reconnaître les erreurs du passé dont la plus brutale a justement été de confiner les vieux dans des établissements financés par leurs modestes retraites et leur épargne. Pour camoufler tous ces manquements et se dédouaner de toute responsabilité et sous prétexte d’un « jamais vu » mensonger, on impose des hypothèses et des suppositions. Sous prétexte d’une contagiosité dont les paramètres ne sont pas encore véritablement établis, les Français doivent rester à un mètre et les Allemands à au moins deux mètres de distance de leur voisin ou ami. Certains pays ont préconisé le masque parce qu’ils en avaient en stock, d’autres ont prétendu que ça ne servait à rien parce qu’ils n’étaient plus capables d’en fabriquer. On a renvoyé les touristes de passage dans leurs pénates mais on a affrété des vols spéciaux pour faire voyager et travailler des personnels saisonniers. Il n’a pas fallu une éternité pour que tous les vices de nos sociétés soient mis à jour et pimentés par des commentaires, avis, conseils et recommandations sur les réseaux sociaux qui ont exacerbé la peur et la panique et rendu les messages scientifiques inaudibles ou incompris. A l’instar de son prédécesseur qui avait parlé de « guerre » contre le terrorisme, Emmanuel Macron a utilisé le même vocable pour la lutte contre le virus et comme il fallait s’y attendre, les grands médias ont utilisé cette image pour faire grimper leurs audiences. Quelle aubaine pour les chaines d’informations en continu que de pouvoir afficher en direct le nombre de morts provoquées par l’ennemi. Ne pouvant plus le faire avec les centièmes de secondes gagnées par les athlètes lors des Jeux Olympiques, elles ont trouvé la parade avec le serial-killer qu’est devenu le corona. A cette redondance d’informations macabres est venue s’ajouter une kyrielle de reportages sur les drames que vont vivre bientôt les victimes collatérales du virus, celles qui vont être contraintes de mendier des aides d’urgence, de liquider leurs affaires, d’aller frapper aux portes des organismes d’aides sociales ou de Pôle Emploi. On nous annonce déjà des vagues de dépression voire de suicides, des violences conjugales, des règlements de compte. Si on comprend bien et si on gobe tout, dès que le virus ne sera plus actif, ce ne sont toujours pas les Epads qu’il faudra améliorer (le seront-ils un jour ?) mais les hôpitaux psychiatriques et les prisons qui devront être agrandis. Personnellement, si j’étais suffisamment vieux et porteur du virus, j’aimerais n’avoir qu’ une seule force, celle de pouvoir chanter Barbara « à mourir pour mourir, je choisis l’âge tendre, et partir pour partir, je ne veux pas attendre. » vjp

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