Douze fleurons allemands dans le rouge

Allemagne/France/Italie/Espagne/UE – La publication des résultats du 1er trimestre des groupes allemands cotés en bourse donnent le vertige et ne laissent rien augurer de positif sur le premier semestre qui pourrait s’avérer annonciateur d’une récession historique dépassant largement les lendemains de la crise financière de 2008. Les douze fleurons inscrits au DAX ont vu leurs bénéfices avant impôts au mieux stagner, c’est le cas de Beiersdorf et Henkel, au pire chuter de 30 à plus de 200%. Comme le confinement à l’échelon planétaire le laissait subodorer, c’est la compagnie aérienne Lufthansa qui est la plus touchée avec un recul de 257% ! La crise sanitaire a eu par ailleurs des conséquences dramatiques sur Adidas (- 93%), Daimler Benz (- 78%), Volkswagen (-77%), Covestro, leader mondial de polymères (-75%), Deutsche Post et Munich RE, compagnie de réassurances (toutes deux à -49%), Continental (- 47%), Siemens (-34%) et  Deutsche Bank (-30%). Tous les observateurs sont unanimes et considèrent que le déconfinement par étapes n’aura que peu d’influence sur le bilan des six premiers mois de l’année.  Il faut par conséquent s’attendre à une rentrée automnale difficile dont les effets seront certes modérés par le ballon d’oxygène de l’Europe mais à condition que la manne financière en provenance de Bruxelles ne se transforme pas en feu de paille.

La survie des canards boiteux

Paradoxalement, la crise sanitaire a contribué en Allemagne à faire chuter en février et mars le nombre de dépôts de bilan. Cette baisse par rapport à la même période de l’année précédente, provient du fait que les services en charge de leur enregistrement n’étaient plus opérationnels, ce qui signifie que des sociétés en situation de cessation de paiements ont pu bénéficier d’un sursis. Le nombre de faillites sur le seul mois de mars a diminué de 13,4% par rapport à mars 2019. Les pouvoirs publics ont probablement commis un erreur en adoptant une loi d’urgence visant à atténuer les conséquences de la pandémie et à reporter les déclarations d’insolvabilité. Selon Volker Römermann, avocat spécialisé dans l’insolvabilité, cité par le quotidien Die Welt, « le gouvernement allemand nourrit ainsi des entreprises zombies ». Derrière ce terme pour le moins péjoratif, se cachent des entreprises qui sont insolvables, agissent sur le marché et mettent en danger les entreprises saines. A moyen et long termes, le risque est grand que les aides publiques consenties en urgence causent autant de dommages que de bénéfices. Il est évident que ce constat n’est pas propre à l’Allemagne mais au contraire flagrant dans tous les pays qui sont susceptibles d’obtenir les aides les plus importantes, en l’occurrence les trois pays d’Europe du sud que sont l’Espagne, l’Italie et la France. Plutôt que d’applaudir la Commission Européenne et à sa soudaine générosité, il serait préférable de réfléchir rationnellement au partage des aides. Il ne sert en effet à rien d’aider des mastodontes si ces soutiens n’ont aucune utilité sur les milliers de sous-traitants qui, au final, recourent à davantage de main d’œuvre. La vraie solidarité européenne ne doit pas consister à générer des effets d’annonces concernant des marques emblématiques et des symboles de fierté patriotique, à l’instar de Renault, Air France ou Lufthansa, mais à veiller à ce que les contributions publiques soient ouvertes à tous et prioritairement à ceux qui travaillent dans l’ombre. vjp

 

 

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