Union Européenne de la Santé : un grand délire dont Bruxelles a le secret

UE/Monde – Il aura fallu attendre neuf longs mois, plusieurs centaines de milliers de personnes infectées ou hospitalisées et plusieurs dizaines de milliers de décès pour que la Commission de Bruxelles  présente ses « premières mesures en vue de la mise en place d’une Union Européenne de la Santé » qui aurait dû être mise en place à chaque étape dans l’élargissement et plus particulièrement lorsque dix Républiques sont venues rejoindre la famille européenne au milieu des années 2000.

Les millions engloutis ne sont pas inédits

Tout se passe comme si le Covid 19 était la première épidémie à laquelle nous sommes confrontés, comme si, cumulés,  les millions de personnes décédées par vagues successives de la grippe, de la canicule ou d’autre maladies contagieuses, dont le sida ou la rougeole, pouvaient s’inscrire au chapitre « pertes et profits » et comme si on faisait une grande découverte en prenant conscience qu’un virus n’a pas de frontière. Dans son communiqué de presse publié le 11 novembre dernier, la Présidente de la Commission, Ursala von der Leyen, a pris conscience « qu’accroître la coordination à l’échelle de l’UE est nécessaire pour intensifier la lutte contre la pandémie de Covid 19 et contre les urgences à venir ». Elle semble mettre temporairement entre parenthèses le « green deal » dont elle était devenue l’apôtre pour répondre  en tant que médecin-épidémiologiste et licenciée en santé publique à « une attente forte des citoyens européens », selon un point de vue très éclairé de son amie Stella Kyriakides, une psychologue chypriote en charge de la santé et accessoirement de l’alimentation à la Commission de Bruxelles. Jamais deux sans trois et pour crédibiliser ces grands objectifs le vice-président de la Commission, le Grec, Margaritis Schinas, en tant que « promoteur de notre mode de vie européen » (!), a tenu à apporter son grain de sel en nous promettant de « renforcer notre capacité de gestion commune des crises pour nous préparer à affronter des menaces transfrontières graves pour la santé. »

Andrea Ammon, DG de l »ECDC

Des ombres et des lumières

Même imprimés, on a du mal à imaginer que des personnes puissent être grassement rémunérées pour écrire et diffuser de telles banalités. Toutes ces lumières bruxelloises évoquent une pandémie mais toutes semblent oublier que la population européenne ne compte que 447 millions d’habitants, soit à peine 6% de la population mondiale. Qu’ils nous expliquent ces brillants cerveaux comment on va pouvoir éradiquer un virus en « renforçant des agences européennes , à savoir le Centre Européen de Préventions et de Contrôle des Maladies (ECDC) et l’Agence Européenne de Médicaments (EMA), deux organismes qui auraient pu aisément se  noyer dans le tonneau des Danaïdes si le virus n’était pas venu frapper à leurs portes. Dans le plan sanitaire qu’Ursula von der Leyen et ses coéquipiers ont annoncé, il n’est question d’aucun chiffrage pour le simple et unique raison que l’Europe dispose déjà depuis des décennies de budgets colossaux destinés à des organismes censés veiller à la santé et à l’alimentation des Européens et il faut espérer que la pandémie permette à ces derniers de pouvoir mettre leur nez dans une gestion à priori pour le moins douteuse. On peut en effet s’interroger à savoir comment on est parvenu à autant d’incohérences et de malentendus lors de l’éclosion puis du développement de la crise sanitaire alors  des centaines de millions d’euros sont dépensés chaque année pour veiller au bien-être de quelques centaines de fonctionnaires, d’experts et de conseillers qui semblent avoir été formés, non pas pour protéger la population européenne, mais pour s’y retrouver dans toutes les réglementations, directives, recommandations qui sont la tasse de thé quotidienne des institutions européennes qui siègent à Bruxelles, Strasbourg ou au Luxembourg.

Guido Rasi, DG de l’EMA
Björn Hansen, DG de l’ECHA

Des sigles à la pelle

A ces deux mastodontes que sont l’EMA et l’ECDC, fondés respectivement en 1995 et 2005 et dotés d’un budget, en 2020,  de 358 et 60 millions d’euros (en hausse de 12,9 et 4,1% par rapport à 2018), sont venus se greffer l’ECHA (Agence Européenne des Produits Chimiques) dont le budget frise les 120 millions. Ce troisième organisme est né en 2007, soit cinq ans après l’Agence  Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA), laquelle dispose d’une enveloppe de 80 millions d’euros. Selon un récent rapport du Sénat, il est prévu que le budget de l’EFSA augmente de 77,5% d’ici 2023 ( !) à 142 millions d’euros, dont 15 millions sont prévus pour des études de vérification.  Et, c’est là que la bât blesse car toutes ces institutions sont administrées à la française c’est-à-dire sans réelle coordination de l’une à l’autre. En France il n’est pas rare qu’une Caisse d’Allocations Familiales suspende sans préavis le versement de l’ Allocations Adultes Handicapés d’une personne ayant atteint l’âge légal d’accès à sa pension avant même que son dossier de retraite ait été finalisé ce qui revient à laisser pendant plusieurs mois des personnes âgées et malades sans un seul centime de revenu. Le risque est grand que ce genre de méthodes se reproduise lorsqu’il sera nécessaire d’indemniser les victimes de coronavirus. Au nom d’une démocratie de façade, on laisse diriger les plus grandes institutions sanitaires par des personnes représentant des pays à faible démographie (*). Si on se fie aux futurs objectifs de l’Agence Européenne des Médicaments énumérés sur le communiqué de presse de la Commission, on demeure pantois. . En effet, les prérogatives de l’EMA n’étaient-elles pas, comme il est préconisé de « surveiller et atténuer le risque de pénurie de médicaments et de dispositifs médicaux critiques, de proposer des conseils scientifiques sur les médicaments susceptibles de traiter, prévenir ou diagnostiquer les maladies à l’origine de ces crises, de coordonner les études d’innocuité et d’efficacité des vaccins et de coordonner les essais cliniques ? » Si oui,  à quoi cela sert-il de les remettre sur le plateau si ne n’est pour rassurer des Européens confinés depuis 25 ans dans l’ignorance ? Si non, où sont allés les centaines de millions d’euros dont on aurait eu besoin pour fabriquer et fournir des masques plutôt que les importer ou pour équiper des hôpitaux en lits de réanimation plutôt que de transférer des vieillards en fin de vie de Bourg-en-Bresse à Strasbourg ?   Mais il arrive, Dieu soit loué, que l’incohérence et l’incompétence soient trahies par des événements qui pourraient paraître anecdotiques mais qui, néanmoins,  en disent long sur  le brouillamini qui règne au sommet des institutions européennes. Il se trouve qu’en République Tchèque, on produit en toute légalité une substance à base de cannabis, le cannabidiol (CBD), commercialisé comme substitut au tabac dans les cigarettes électroniques. Etant donné que cette huile provient de la plante cannabis sativa dans son intégralité et « non de ses seules fibres et graines », elle n’est pas nocive comme le prétendait la France qui en avait interdit la vente mais a été récemment déboutée par la Cour Européenne de Justice ; laquelle a considéré que le CBD « n’a pas d’effet psychotrope, ni d’effet nocif sur la santé humaine » . Si des litiges d’une telle importance ne trouvent leur épilogue qu’à la CEJ, il ne faut alors pas s’étonner que les vaches aient mangé de la farine de poisson et que nos prairies soient encore inondées de glyphosate. vjp

(*) C’est le cas de l’ECDC avec la Suédoise Andrea Ammon, de l’EMA avec le Hollandais Guido Rasi ou de l’ECHA avec le Finlandais Bjorn Hansen.      

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