Un attentat de grande ampleur a-t-il été réellement déjoué ?

Allemagne – C’est la question que se posent les autorités allemandes après l’arrestation, ce dimanche en pleine nuit, de deux frères iraniens âgés de 25 et 32 ans, soupçonnés de fomenter un attentat à l’arme chimique. Les forces de police du land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie (NRW),  accompagnées de plusieurs collaborateurs de l’Office Fédéral de la Criminalité (BundesKriminalAmt/BKA) mais aussi de l’Institut Robert-Koch (RKI) qui est habilité à lister les substances potentiellement utilisables en tant qu’armes chimiques, sont intervenues après avoir reçu un message d’alerte en provenance du FBI.

Une arme 67 fois plus dévastatrice

Selon les services secrets américains, les deux hommes résidant à Castrop-Rauxel, une ville de quelque 71.000 habitants située à une cinquantaine de kilomètres de Münster, auraient constitué un stock de cyanure et de ricine suffisant pour provoquer la mort de 13.500 personnes, soit 67 fois plus que le nombre de victimes consécutif à l’explosion d’une bombe à fragmentation chargée de billes et clous en acier. Toutefois, après avoir perquisitionné et passé au crible l’appartement occupé par les deux Iraniens, aucune trace de ces deux poisons n’a été détectée, ce qui a transformé cette opération de grande envergure avec alerte aux habitants et mise en place d’un large périmètre de sécurité en un « non-événement ». S’agit-il pour autant d’une coquille entièrement vide ? Les enquêteurs ne le pensent pas et sont à la recherche d’autres preuves. Ils ont encore en mémoire une affaire qui s’est déroulée, il y a quatre ans à Cologne, et qui avait conduit à l’arrestation d’un jeune Tunisien et de son épouse de nationalité allemande, qui,  après s’être fait livrer une importante quantité de ricine, avaient déclenché des explosions tests et là encore ce sont des services étrangers qui en avaient informé la police allemande. Personne, dans les milieux de la sécurité et de la justice ne veut prendre le moindre risque lorsque des menaces d’attentat à l’arme chimique sont signalées. C’est ainsi que le parquet général de Düsseldorf a autorisé la perquisition au moment même où il a eu connaissance des informations transmises par le FBI.

Christophe de Vries: il réclame une surveillances accrue des réseaux cryptés
Le ministre fédéral de la Justice, Marco Buschmann, se refuse à tout décryptage des données personnelles tant que la loi ne l’autorisera pas de manière stricte et vigilante.

Des Allemands protégés par des étrangers

Que les forces de police soient amenées à intervenir suite à des signalements transmis par des sources étrangères est un phénomène fréquent en République Fédérale, ce qu’a récemment dénoncé le député démocrate-chrétien Christoph de Vries dans une question écrite au Bundestag. Dans ce document, il est rappelé que sur les treize attentats programmés dans le pays depuis 2011, six ont été déjoués grâce à des renseignements en provenance d’autres Etats, ce qui tend à prouver que la RFA n’est pas en mesure d’assurer, seule, la sécurité de sa population. Le parlementaire de l’opposition estime que le moment est venu pour observer et analyser les communications cryptées qui prolifèrent sur de nombreux services de messagerie, dont WhattsApp la plus populaire fait également partie. Mais selon le ministre de la justice, l’utilisation d’instruments tels que la surveillance des télécommunications à la source et les perquisitions en ligne, ne peut être envisagée que dans un cadre juridique étroit et contrôlé avec la plus grande vigilance, un argument que Christoph de Vries considère comme « grossièrement irresponsable car il conduit à ce que nos autorités de sécurité deviennent complètement aveugles. » Que les deux Iraniens soient ou non complices de mouvements islamistes et terroristes cette descente inopinée à minuit à leur domicile laissera des traces car elle va relancer le débat sur l’intégration. Tous deux sont arrivés en Allemagne en 2015, l’année qui été marquée par un afflux inédit de réfugiés auquel les structures politiques, sociales et administratives ont su faire face. En revanche, il semblerait qu’il n’en fût pas de même des canaux sécuritaires. kb & vjp

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