Allemagne – Comme si les Allemands n’avaient pas suffisamment de pain sur la planche avec leur coalition au pouvoir dont les membres semblent prendre un malin plaisir à se dresser mutuellement des bâtons dans les roues, leurs retraites dont ils ignorent comment ils vont pouvoir les financer, leurs quelque cinq millions de personnes dépendantes de leur entourage pour survivre, leurs écoles sans enseignants, leurs hôpitaux sans personnel, comme si les Allemands n’avaient pas tous ces problèmes à régler, voilà qu’ils ne trouvent rien de mieux que de s’indigner du comportement de quelques filles et fils à papa aussi friqué(e)s qui s’ébrouent dans l’ombre de l’extrême-droite.
« L’Allemagne aux Allemands ! »
Ces jeunes gens ne s’imaginaient pas qu’en se rendant sur l’île de Sylt, comme ils le font habituellement à la Pentecôte, qu’ils allaient provoquer un véritable cyclone. Ils ont commencé par arriver avec leur Porsche, leur BMW, leur Mercedes ou leur Ferrari, ils ont déposé leur bagages Vuitton à leur hôtel, ils sont partis sur la plage équipés de leurs sacs Hermès, elles ont dévoilé leurs tenues de bain aux coupes minimalistes et aux imprimés délicats, ils les ont admirées et draguées un verre de champagne à la main, tout ce beau monde s’est congratulé, embrassé et admiré. Ils ont beaucoup bu. Ils ont savouré les scampis cuisinés par le chef du restaurant Gosch, les meilleurs au monde paraît-il, et puis ils sont allés danser et s’éclater au bar légendaire de l’île, le Zanzibar, ce lieu culte où il faut à tout prix avoir été vu au moins une fois dans la vie avant de mourir, ce qui est le cas de l’actuel ministre des finances qui a choisi récemment ce lieu emblématique pour y célébrer son mariage en présence de tout le Gotha, dont le Chancelier social-démocrate Olaf Scholz en personne. Lorsqu’il se passe quelque chose à Sylt, ça ne passe jamais inaperçu et naturellement lorsque cette petite bande de snobinards, enivrés et probablement au minimum « cannabisés » peut-être « cocäinés » s’est mise à entonner la chanson du DJ Gigi d’Agostino « L’amour toujours » en en détournant le sens des paroles, le texte original et répétitif, foncièrement apolitique s’est transformé en « Etrangers dehors, étrangers dehors. L’Allemagne aux Allemands, les étrangers dehors ». L’affaire en serait restée là et serait passée inaperçue si elle n’avait été pas filmée et relayée par les réseaux sociaux et les Allemands se sont alors aperçus que leur « élite » sans culture n’était ni plus, ni moins qu’une honte à la Nation.
Censurer une chanson ne suffit pas
Toute la gente politique au pouvoir, sociale-démocrate, chrétienne-démocrate et écologiste, s’est offusquée avant de condamner publiquement le comportement de ces jeunes mal-appris. Certains employés de cette parade qui ont été filmés chantant en choeur avec leurs clients ont été licenciés alors qu’aucun texte de loi ne prévoit de telles sanctions dans une telle circonstance ce qui est logique car aucune loi dans un pays se prétendant démocratique ne pouvait prévoir un tel événement. Le défi auquel sont désormais confrontés tous les gérants de lieux cultes ou organisateurs de manifestations populaires consiste à éviter que de tels faits se reproduisent. Le premier d’entre aux à avoir paniqué est le responsable de l’Oktoberfest de Munich qui a d’ores et déjà annoncé que la chanson de Gigi d’Agostino sera interdite pendant toute la durée de cette célèbre fête de la bière qui attire chaque année entre six et sept millions de visiteurs. Toutefois, la décision de Clemens Baumgartner est loin de faire l’unanimité, premièrement parce qu’elle fait de Gigi d’Agostino, un homme qui s’adonne à la musique et rien qu’à la musique, un bouc émissaire, deuxièmement parce qu’elle peut encourager les extrémistes à détourner les paroles d’une autre chanson encore plus populaire que ne l’est « L’amour toujours ». Censurer une chanson dont le titre est français, la musique composée par un Italien et interprétée en anglais sous le seul prétexte qu’elle a été trafiquée par une petite bande de jeunes idiots, ne résoudra pas les problèmes de racisme auxquels le pays est confronté. Cet incident n’est cependant pas anodin car ceux qui en sont à l’origine sont aussi ceux qui, de par leur origine sociale, sont les mieux placés pour configurer l’avenir du pays. Le moment est venu pour les dirigeants actuels de ne plus se contenter de condamner verbalement de tels agissements mais d’agir sur le terrain et de considérer tous ceux qui promeuvent la violence à l’encontre des minorités, qu’elles soient ou non étrangères, comme de réels délinquants. (kb & vjp)