L’UE se rallie aux thèses nationalistes

Barbelés, miradors, caméras, véhicules de contrôle et de sécurité: l’Union Européenne est disposée à débloquer quelque trois milliards d’euros pour se protéger d’une invasion migrants.

Autriche/Hongrie/Serbie/UE – Lors du sommet européen consacré à l’immigration qui a eu lieu cette semaine à Bruxelles, le Chancelier conservateur de la République Fédérale d’Autriche, Karl Nehammer (notre photo), est arrivé à ses fins. Chacun sait que le chef de gouvernement autrichien sur ce sujet ultra sensible qu’est celui de l’accueil des migrants, a toujours été plus proche des positions de son voisin hongrois Viktor Orban que de celles de l’ex-Chancelière allemande Angela Merkel.

« La politique d’asile a échoué »

En septembre 2022, les deux hommes rejoints par le président de la République serbe, Aleksandar Vucic, avaient publiquement dénoncé l’incapacité de l’Union Européenne à maîtriser la crise migratoire. Quelques semaines plus tard, l’Autriche faisait usage de son de veto pour interdire à la Roumanie et à la Bulgarie d’intégrer l’espace Schengen. Lors de ce dernier sommet sur l’immigration, les pays hostiles à l’afflux non maîtrisé de migrants, ont obtenu, du moins de la papier, la garantie d’un renforcement de la politique d’asile afin de mettre fin aux entrées illégales. Sont envisagées par ailleurs une lutte accrue contre les passeurs, un plus grand contrôle des frontières et une plus grande rapidité des expulsions. Concernant l’érection de barbelés aux frontières, souhaitée par la Grèce et l’Autriche, elle est évoquée dans la déclaration en des termes plus châtiés, le mot « barbelés » ayant été remplacé par « infrastructures ». Les autorités européennes semblent avoir pris conscience de la réalité des faits, en l’occurrence que la contribution de l’Autriche, compte tenu de sa démographie est disproportionnée comparativement à celle d’autres territoires beaucoup plus peuplés. Le Chancelier autrichien ne lâche pas ses mots et n’hésite pas à déclarer que « la politique d’asile a échoué ». La présidente de la commission européenne, Ursula van der Leyen, a promis de tout mettre en œuvre pour sécuriser la frontière entre la Bulgarie, membre de l’Union Européenne et la Turquie avec des véhicules, des caméras et des miradors. Ces équipements devraient être financés par des fonds européens, les contributions des Etats membres et dans une moindre mesure par la Bulgarie. Karl Nehammer s’est réjouit de voir les institutions européennes « passer à la vitesse supérieure » pour mettre fin à l’immigration clandestine. Le fait que le premier ministre luxembourgeois, Xavier Bettel, opposé jusque là aux clôtures barbelées érigées aux frontières, ait consenti aux nouvelles propositions est, selon Nehammer, un signe encourageant.

Une forme déguisée de sanctions économiques

Quant au financement de toutes ces mesures, il a été évalué dans un premier temps à quelque trois milliards d’euros, un volume conséquent qui ne suffira néanmoins pas pour atteindre l’objectif du « zéro immigration illicite ». D’autres moyens financiers devront être obtenus ou réaffectés. L’Union Européenne fait toutefois une grave entorse à ses valeurs de démocratie et de libre circulation des individus lorsqu’elle préconise de faire pression sur les pays dont sont originaires les réfugiés afin que ces derniers soient dissuadés de franchir la Méditerranée. Cette pression, elle s’opérerait par le truchement d’une politique de visas plus stricte et si nécessaire d’une baisse voire d’une suppression des aides au développement, ce qui s’apparenterait à une forme camouflée de sanctions économiques. Encore une fois, on constate que les mesures prises ou envisagées par Bruxelles sont loin des réalités. Si autant de migrants quittent leur territoire, c’est parce qu’ils n’ont ni les moyens d’y survivre, ni même de s’y nourrir et ce n’est pas en punissant leurs dirigeants qui de toute façon ne meurent jamais de faim, que le problème de l’immigration qu’elle soit ou non, sera résolu. Priver certains pays africains de soutien à leur développement consiste à ouvrir leurs portes à d’autre régimes autoritaires, Chine, Russie ou Arabie Saoudite confondus. Il faut par ailleurs préciser que cet « afflux » de réfugiés a certes connu une croissance exponentielle en 2022 de 50% ce qui a concerné 924.000 demandes d’asile mais que ce nombre, ramené à la population globale de l’Union Européenne, n’en représente que 0,2%. kb & gs

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