Les relations germano-polonaises toujours entachées par le passé

Allemagne/Pologne – Le premier s’appelait Tadeusz Sledzinki, exerçait la profession d’ingérieur tout en ayant déposé vingt-neuf brevets, le second, Leopold Wiellisz était un entrepreneur, financier et philanthrope reconnu. Tous deux ont été employé de force par les groupes Bayer et Henschel après l’annexion de la Pologne par l’Allemagne en 1939. Plus de 80 ans après ces faits, leurs descendants réclament des dommages et intérêts dont le montant a été évalué à 4,3 millions d’euros.

Les plaintes sont actuellement en attente d’autorisation auprès de la justice polonaise mais tout laisse à penser qu’elles aboutiront à un procès car le gouvernement polonais est le premier à solliciter de fortes indemnités au gouvernement de la République Fédérale d’Allemagne pour les dommages causés pendant la Seconde Guerre Mondiale ; lesquels ont été estimés à 1,3 billion d’euros. Selon Monika Brzozowska-Pasieka , avocate auprès de la fondation « Defenders War Compensation », le demande formulée par les héritiers est justifiée car « si quelqu’un a profité des préjudices d’un autre , il doit payer une compensation».  Et c’est ce principe de base que Jaroslaw Kcazinski, président du parti national-conservateur PiS actuellement au pouvoir, met systématiquement en avant pour réclamer les réparations. Cette affaire a pris un tournant diplomatique et le ministre polonais des Affaires Etrangères, Arkadiusz Mularczyk, ne cache pas vouloir essayer « de susciter l’intérêt des organisations internationales mais aussi des partenaires occidentaux sur la question des injustices commises pendant la guerre dans différents et des inégalités de traitement ».

Travail forcé de femmes et d’hommes polonais pendant la 2ième guerre mondiale

Une année de vie à 5.500 euros

Naturellement, à Berlin, on ne l’entend pas de la même oreille. Tous les gouvernements qui se sont succédé depuis la naissance de la République Fédérale sont partis du principe que le contentieux a trouvé son épilogue dès 1945, année au cours de laquelle la Pologne sous l’impulsion de l’Union Soviétique a obtenu les anciens territoires allemands de l’Est. Il est rappelé par ailleurs qu’en 1957, la Pologne, alors sous le joug de l’URSS avait renoncé par un traité aux réparations. C’est sur cette déclaration de renoncement du côté polonais que les spécialistes du droit international risquent de s’appuyer pour débouter la Pologne de ses prétentions, d’autant que les gouvernements en fonction à Varsovie après 1989 n’ont jamais remis cette affaire à l’ordre du jour. Il faut par ailleurs préciser qu’après sa réunification, la RFA a versé à la Pologne 500 millions de marks au titre d’un accord global de coopération et qu’elle a indemnisé les travailleurs forcés ayant survécu. Pour l’instant la Chancellerie allemande n’a pas pris officiellement position estimant que les procédures en cours relèvent de tribunaux polonais. Le traumatisme vécu par la Pologne entre 1939 et 1945, a été tel qu’il n’a pu être effacé du jour au lendemain et il est tout à fait normal qu’il puisse perdurer encore de longues années. Il n’en demeure pas moins qu’il est difficile d’estimer la « valeur » d’une vie humaine encore moins la potentielle espérance de vie des victimes. Ce que l’on connaît en revanche est le nombre de personnes polonaises qui ont péri dans le conflit et qui s’est élevé à au moins six millions. Etant donné que parmi elles se trouvaient un nombre important d’enfants et d’adolescents qui auraient pu vivre pendant au moins trente ou cinquante ans, on peut estimer à au moins 240 millions le nombre d’années de vie qui ont été brisées. Vues sous cet angle, les sollicitations du gouvernement polonais (1.300 milliards d’euros) ne sont pas aussi exorbitantes qu’elles apparaissent au premier abord car elles ne représentent qu’à peine 5.500 euros par année de vie sacrifiée. Quoiqu’il en soit, il est peu probable que la Pologne parvienne à ses fins car le terrain sur lequel elle se meut, est beaucoup trop sensible pour devenir réalité. Car si l’Allemagne était sommée s’acquitter des réparations réclamées par la Pologne, ce litige aurait un effet boule de neige devenant très vite incontrôlable car tous les pays ou presque ont des comptes à rendre avec leur passé. kb et pw (Nombre de mots : 662)

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