La responsabilité européenne dans les «foyers de l’horreur»

Roumanie/UE – Le chef du gouvernement roumain, Marcel Ciolacu, se voit contraint d’intervenir à grande échelle dans le scandale des foyers de l’horreur révélé la semaine dernière.

Le limogeage de deux ministres ne suffira pas à faire oublier ce sinistre scandale.

Après la démission forcée du ministre du Travail puis de sa collègue en charge de la Famille, de la Jeunesse et des Personnes Handicapées, Gabriela Firea, le Premier Ministre a vivement recommandé à ceux qui sont directement ou indirectement impliqués dans ces graves dysfonctionnements, de reconnaître leur responsabilité et de prendre d’eux-mêmes la décision d’abandonner leur fonction. Les premiers concernés par cette exhortation sont les maires ainsi que les chefs de conseils de district, les chefs des autorités sanitaires mais aussi certains responsables de la police locale qui ont fermé les yeux face aux signalements d’actes de maltraitance. Parmi les personnes les plus fréquemment citées, se trouvent le mari de Gabriela Firea, Florentin Pandela, maire social-démocrate de Voluntari et Hubert Thuma, président libéral du conseil régional d’Ilfov.

Une forme insidieuse de crime organisé

Pour accélérer les procédures d’investigation menées par l’organisme du lutte contre la corruption DNA, il a été fait appel au parquet anti-mafia DIICOT, chargé en temps normal de la lutte contre le crime organisé. Quelques jours à peine après avoir commencé ses investigations, le DIICOT a fait savoir qu’il avait déjà demandé des expertises médico-légales pour 98 personnes âgées afin de déterminer si elles avaient été maltraitées voire droguées. Les autorités, DNA et DIICOT confondus, ont annoncé que des contrôles avaient déjà été effectués dans près de 2.700 établissements, dont trente ont fait l’objet d’une fermeture immédiate. Les activités de trente six autres maisons de retraite ont été temporairement suspendues. Compte tenu de la généralisation des expertises, il faut s’attendre dans les jours et semaines à venir, à ce que plusieurs centaines d’établissements soient forcés de fermer leurs portes, ce qui va obliger le gouvernement à reconsidérer de A à Z sa politique en matière d’hébergement et de soins des personnes vulnérables que sont les personnes âgées. Selon le président du parti d’opposition USR, Catalin Drula, l’équipe gouvernementale devrait commencer par supprimer le ministère de la Famille, un ministère fantoche qui n’a été créé que pour « placer » Gabriele Firea et qui ne sert à rien si ce n’est « consommer des ressources budgétaires ».

Cette vieille dame roumaine qui mendie depuis plus de dix ans dans une rue de St-Etienne (France) est probablement plus heureuse ici que dans un EPAD de son pays rongé par la corruption !

Le manque de vision des dirigeants

Le scandale auquel on assiste actuellement en Roumanie est le résultat d’une incompétence flagrante de tous les gouvernements qui ont eu la responsabilité de gérer le pays. Aucun d’entre eux n’a pris conscience que l’entrée dans l’Union Européenne allait avoir comme conséquence une nouvelle configuration de la structure démographique. Entre 1990 et 2023, le pourcentage de personnes âgées de 65 ans et plus a presque doublé en passant de 10,5% à 18,5% de la population. Sur cette même période la tranche des 15-64 ans a, en revanche, stagné aux alentours de 65%. Ce vieillissement de la population s’est accompagné d’un autre phénomène provoqué également par l’adhésion à l’Union Européenne, en l’occurrence la fuite à l’étranger d’un nombre croissant d’année en année de travailleurs roumains. Ces personnes sont parties pour des raisons économiques sans se soucier outre-mesure du sort qui allait être réservés à leurs géniteurs qui, lorsqu’ils deviennent dépendants,  ne peuvent plus compter sur leur famille pour les épauler. Les membres de la diaspora roumaine pour s’assurer un avenir meilleur n’hésitent pas à laisser derrière leurs parents et grands-parents mais aussi leurs propres enfants. L’Office national des statistiques (ONS) a récemment révélé avoir recensé 536.000 enfants dont au moins un des parents travaille à l’étranger. 232.000 d’entre eux vivent sans leur mère, plus de trois cent mille sans leur père et 77.000 d’entre eux n’ont ni père, ni mère pour les éduquer. Alors que les Roumaines trouvent un emploi essentiellement en Italie (21%), en Espagne (17%) ou en Autriche (12%), les Roumains répondent aux besoins en main d’oeuvre en Allemagne (24%), en Italie (22%) et au Royaume-Uni (14%). Une forte majorité des enfants et adolescents interrogés par l’ONS reconnaissent ne pas avoir voulu accompagner leurs parents et abandonner leur environnement. Laissée généralement à elle-même, cette population génère une classe sociale spécifique, laquelle morcelée et difficile à encadrer, exacerbe tous les problèmes de la société. Tous ces enfants bénéficient de moins en moins de soins médicaux. Ils sont cinq fois plus que leurs camarades enclins à consommer de l’alcool, du tabac et des drogues mais aussi à commettre des actes de violence. La comparaison est de plus en plus évidente entre le désarroi de cette jeunesse en perdition et le sort qui est réservé aux personnes âgées ou handicapées. Deux groupes de la société roumaine qui ne sont plus victimes du communisme mais d’un régime qui se prétend démocratique alors qu’en réalité il ne l’a jamais réellement été. Cette affaire des « foyers de l’horreur » est une très grave entrave aux Droits de l’Homme et on peut légitimement s’interroger à savoir pourquoi la Commission Européenne qui n’hésite pas à exercer des sanctions à l’encontre de la Pologne et de la Hongrie pour des faits infiniment moins graves, acquiesce par son silence aux actes commis en Roumanie. Et que dire enfin de la presse occidentale qui n’a accordé jusqu’à ce jour aucune importance à ce scandale dont ont été victimes des milliers de personnes vulnérables. vjp (Article rédigé à partir des informations publiées par l’ADZ)

 

error: Content is protected !!