Des batteries non polluantes inspirées des lois de la nature

Allemagne/UE/Chine – Regardez bien cet homme, il s’appelle Peter Geigle, est âgé de 59 ans et s’ apprête à commercialiser des batteries qui ont toutes les chances de révolutionner l’industrie automobile et surtout de renoncer à l’usage du lithium et du cobalt. Si, après des années de recherche, il est parvenu à se fins, c’est grâce aux études en médecine qu’il a effectuées avant de changer de voie et de se lancer dans les affaires. Il est parti du principe que chaque plante, chaque organisme vivant stocke de l’énergie au moyen de molécules organiques pour les transformer en sucre et amidon. «L’homme a perfectionné ce système et pour assurer sa mobilité, il constitue des réserves de graisse dont chaque kilogramme lui permet de stocker 10 kWh d’énergie. » explique-t-il dans la présentation de son entreprise CMBlu, implantée à Alzenau, une petite ville située en Basse-Franconie (Bavière) à quelques kilomètres de la Hesse.

La nature fait très bien son travail

Celui qui a fondé auparavant la société Greentech à l’origine de la SFB (Solid Flow Battery), terme adopté pour les batteries à flux organique, s’est toujours étonné qu’on soit obligé de recourir à des métaux rares pour fabriquer des accumulateurs d’électricité alors qu’il suffit d’observer la nature pour s’en dispenser. La transition vers les énergies renouvelables nécessite des systèmes de stockage de l’énergie puissants, évolutifs et abordables qui ne nuisent pas aux personnes et à la nature. Cependant, les options actuelles sont confrontées à des coûts élevés, à des problèmes de sécurité et à des préoccupations environnementales et sociales. Elles reposent sur des ressources rares qui sont extraites dans des conditions éthiques et écologiques douteuses, consomment beaucoup d’énergie et sont transportées dans le monde entier via de longues chaînes d’approvisionnement. En raison de l’augmentation rapide de la demande de batteries dans le domaine de l’électro-mobilité, il va y avoir des goulets d’étranglement dramatiques dans la disponibilité de ces matériaux. Pour de nombreuses applications, l’inflammabilité des systèmes de batteries existants est un autre problème majeur. La batterie organique à flux solide de CMBlu est différente – et c’est la première de son genre à pouvoir être commercialisée. « Notre technologie est basée sur des matériaux organiques entièrement recyclables qui sont disponibles dans le monde entier, déclare Peter Geigle avant de poursuivre, «les solutions aqueuses d’électrolytes sont ininflammables et assurent un fonctionnement absolument sûr et fiable. »

Le recyclage des batteries : un casse-tête chinois !

Par rapport aux systèmes de batteries établis précédemment, ces batteries organiques à flux solide se caractérisent par une libre évolutipn entre la puissance et la capacité. Elles peuvent donc être adaptées précisément aux exigences individuelles de l’application avec des avantages conséquents en terme de coût. La séparation de l’électrolyte et du convertisseur d’énergie, inhérente au système, permet non seulement d’éviter l’auto-décharge, mais aussi de retrouver les performances d’origine en remplaçant simplement les composants individuels au lieu de la batterie tout entière, ce qui est un avantage majeur à une époque où chacun s’interroge déjà à savoir comment les batteries peuvent être stockées puis recyclées. Un avenir énergétique propre et renouvelable exige des concepts radicalement nouveaux pour le stockage de l’énergie. Cette batterie organique à flux solide véritablement verte bouleverse le marché du stockage de l’énergie pour accélérer la transition et atteindre plus rapidement les objectifs climatiques. De plus en plus d’électricité tirée de l’éolien ou du solaire doit remplacer en Europe, Amérique et Asie les centrales à charbon et à gaz, mais le problème majeur de l’électricité renouvelable provient du fait qu’elle varie en fonction des conditions météorologiques au cours de la journée et des saisons alors que les consommateurs ont besoin d’un approvisionnement stable et réglable en fonction de leurs attentes. Si on veut réussir la transition énergétique mondiale, il va falloir trouver à tout prix un moyen de stocker l’électricité puisée dans les énergies renouvelables. Peter Geigle a constaté à l’occasion d’un voyage aux Etats-Unis que la ville de Los Angeles disposait d’une capacité de stockage de batteries supérieure à celle de l’Europe toute entière et on n’ose imaginer l’ampleur du problème lorsque tous les automobilistes seront contraints de rouler électrique. Dans le cité californienne des halles entiers sont remplis de blocs de stockage ayant la dimension d’une armoire et contenant essentiellement des batteries BYD et CATL fabriquées en Chine.

Stephan Shama, président de Burgenland Energy et Peter Geigle présentant l’accumulateur d’électricité inventé et produit par CMBlu
Parc éolien situé dans le Burgenland entre les villes de Gols et de Möndorf. D’une manière générale, les Autrichiens sont favorables à ce type d’équipements et il est extrêmement rare qu’ils s’opposent à leur construction.

L’Autriche partante dans l’aventure

Le groupe de production et de distribution énergétique allemand Uniper, nationalisé en septembre dernier en réponse à la crise, s’intéresse de près à la technologie CMBlu car il veut à tout prix éviter de revivre avec la Chine le scénario vécu avec la Russie et l’approvisionnement en gaz et pétrole. Pour de nombreux observateurs et quelques investisseurs audacieux, CMBlu est bien partie pour suivre le même parcours sur les plans énergétique et environnemental que BioNTech sur le plan sanitaire. C’est en tout cas ce dont est persuadé Achim Becker, le fondateur de Data Becker, qui s’est associé à Geigle, lequel grâce à l’apport de trois autres investisseurs dispose de cent millions de dollars pour développer son projet et commercialiser au plus vite les batteries du futur. Pour tester sur le terrain les nouveaux accumulateurs d’électricité, le fondateur de CMBlu a eu l’oreille attentive des responsables de l’approvisionnement énergétique du Burgenland, une région autrichienne qui a l’avantage d’être à la fois ventée, ensoleillée et à ca double titre exemplaire dans le domaine des énergies renouvelables. Le Burgenland est doté de nombreux parcs éoliens et fin 2021, on y dénombrait 1 307 éoliennes d’une puissance totale de 3 300 mégawatts produisant de l’électricité propre, locale et respectueuse de l’environnement pour environ 2,2 millions de foyers, soit environ 50 % de tous les foyers autrichiens. Ce territoire a par ailleurs l’avantage d’être situé à proximité de frontières slovène, slovaque et hongroise. kb & vjp

 

 

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