La gestion douteuse du budget roumain

Roumanie/UE – Pour la première fois depuis la chute du communisme, les hôpitaux publics roumains sont devenus insolvables, car la caisse d’assurance maladie n’a plus les moyens suffisants pour payer les frais médicaux qu’ils facturent.

Le personnel soignant de l’hôpital Marius Nasta a été aux premières loges lors de la pandémie. Il ne perçoit plus ses salaires !

Des hôpitaux en souffrance

Cette situation inédite oblige à ce jour les patients à payer eux-mêmes la plupart des médicaments et traitements qui leur sont prescrits, alors même qu’ils se sont acquittés de leur cotisation. L’un des plus grands hôpitaux de la capitale, le Bagdasar-Arseni, a dû se contenter ce mois-ci de 80 euros (!). Un budget dérisoire qui a eu pour conséquence le non-paiement du personnel. Un autre établissement hospitalier, le Marius Nasta, également implanté à Bucarest et très connu dans le pays pour ses traitements contre les maladies pulmonaires se trouve dans la même situation et ne pourra encore fonctionner normalement que pendant quelques jours. La caisse nationale d’assurance maladie tout comme le ministère de la santé en ont été informés depuis très longtemps, la première demandant au second une aide de 4,2 milliards de lei (840 millions d’euros) afin que puissent être régularisés les frais médicaux facturés en octobre et novembre. Mais, bien que conscient de la réalité de ce contexte, le chef de gouvernement, Marcel Ciolacu, membre du parti social-démocrate (PSD) ne semble pas s’en inquiéter outre-mesure et n’a daigné débloquer que 1,7 milliard (340 M€), ce qui ne représente que 40% des sommes dont les établissements hospitaliers ont urgemment besoin pour poursuivre normalement leurs activités et s’acquitter des arriérés de salaires. Cette politique d’austérité est menée au moment où le pays risque de ne pas être épargné par les épidémies de grippe ou une résurgence du Covid 19, ce que ne laisse rien présager de bon pour les semaines et les mois à venir.

L’aéroport de Tulcea situé à une centaine de kilomètres de celui de Constanza n’a enregistré en 2022 que 360 passagers, soit même pas un par jour !

Des aéroports en convalescence

L’attitude du gouvernement serait à la limite compréhensible si tous les secteurs publics étaient logés à la même enseigne. Or, il n’en est rien car l’alerte lancée par les milieux hospitaliers a été concomitante avec la décision de l’Etat de subventionner à coups de centaines de millions de lei des aéroports régionaux endémiquement déficitaires et dont chacun sait qu’ils n’ont aucun avenir. Peut prétendre à des soutiens financiers publics toute plateforme aéroportuaire qui enregistre annuellement moins de deux cent mille passagers, ce qui est le cas de sept d’entre elles sur les dix-sept en activités, soit plus de 40%. Six génèrent moins de 100.000 passagers et le bonnet d’âne est porté par l’aéroport de Tulcea dont le nombre de passagers est inférieur au nombre jours que compte une année. A Tulcea, les voyageurs ne se bousculaient pas en 2022 au portillon et n’ont pas eu besoin de poireauter lors de l’enregistrement de  leurs bagages, car ils n’ont été que 360 à pénétrer dans ce qu’il est difficile d’appeler un aéroport. Un an auparavant, leur nombre n’avait pas dépasser les 73 ! Dans un pays « normal », une telle infrastructure aurait disparu de la carte mais en Roumanie, il en a été hors de question. Pourquoi ? Tout simplement parce que l’Etat et les élus locaux du district sont persuadés que le delta du Danube va attirer de plus en plus de touristes qui seront susceptibles d’affluer « en masse » dans la région. Il faut être vraiment naïf pour avaler une telle pilule car l’aéroport de Constanza, a enregistré en 2022 moins de 80.000 passagers, alors même qu’il est situé à proximité de la Mer Noire, haut lieu touristique du pays. Mis à part les quatre plus grands aéroports que sont ceux de Bucarest, Cluj, Iasi et Timisoara et qui franchissent la barre du million de passagers, aucun autre n’est réellement rentable et la plupart sont déficitaires. C’est le cas de celui d’Arad dont le budget n’est couvert qu’à hauteur de 16% par le trafic passagers (16.633 en 2022), les 84% restants étant assurés par des subventions d’Etat ou régionales. Dans cet univers plus ou moins fumeux, il arrive que certaines décisions laissent dubitatif à l’instar de celle prise par les élus du district de Bacau qui a alloué 600.000 euros de subventions à son aéroport alors que ce dernier avait déjà bénéficié d’une aide de 1,8 million d’euros de la part de l’Etat. Des subventions cumulées qui sont d’autant plus incompréhensibles que l’aéroport a été fréquenté l’an dernier par plus d’un demi-million de passagers et qu’à ce titre il n’avait droit à aucune aide. Dans un pays où les personnels soignants travaillent d’arrache-pied sans être payés et où les contrôleurs aériens n’ont que les étoiles à scruter dans le ciel, il ne faut pas s’étonner de voir un nombre croissant d’habitants s’éloigner de ceux qui les dirigent et l’extrême-droite marquer des points. Selon un dernier sondage, si des élections législatives avaient lieu aujourd’hui, le parti misogyne, homophobe, raciste, antisémite et anti-européen AUR (*) pourrait se retrouver à égalité avec le parti libéral PNL actuellement au pouvoir avec le PSD, ce qui ferait de la Roumanie un pays impossible à gérer. (Source : adz/ Adaptation en français : pg5i)

(*) pg5i a consacré le 11 décembre 2020 un article sur ce parti intitulé « Des misogynes dans le Parlement roumain« 

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