Pléthore de candidats aux Présidentielles roumaines

Roumanie – Les Roumains ont beau bouder les urnes à l’occasion de chaque élection, les forts taux d’abstention ne dissuadent pas pour autant les candidats potentiels à tenter leur chance. Les prochaines présidentielles qui vont se dérouler le 10 novembre prochain, confirment ce phénomène avec quatorze têtes de liste dont seulement deux femmes en lice pour occuper une fonction qui est un mélange des systèmes allemand et français, dans le sens où elle est surtout honorifique tout en étant dotée de pouvoirs suffisamment importants pour remettre en question certaines décisions des gouvernements en place.

Un sortant face à une corrompue

De cette censure à l’égard des Premiers Ministres, le président sortant, Klaus Johannis, candidat à sa réélection ne s’en est pas privé depuis 2016, année au cours de laquelle il avait créé la surprise en étant élu à l’issue d’une campagne tellement féroce et souvent ubuesque qu’elle avait découragé les électeurs de se rendre aux urnes. A peine 40% des inscrits assumèrent leur devoir civique au second tour. S’il fallait choisir un pays champion toute catégorie en matière de découragement politique, la Roumanie pourrait y occuper haut la main et sans rival la première place. Cette année la bataille s’annonce encore plus animée qu’à l’accoutumée car elle est le prolongement d’une lutte que se livrent depuis bientôt deux ans le libéral Johannis et la 1ière Ministre Viorica Dancila, présidente du Parti Social Démocrate depuis mai dernier en remplacement de Liviu Dragnea, contraint à la démission pour faits de corruption. Le duo Dragnea-Dancila pollue le climat politique roumain depuis des années mais il parvient, pour des raisons difficiles à comprendre dans un pays membre de l’Union Européenne, à se maintenir au pouvoir, ce qui tend à prouver que l’Europe est géographiquement à deux vitesses car force est de constater qu’on censure à Budapest ce qui est autorisé à Bucarest. Les deux candidats actuellement en fonction se retrouvent face à douze concurrents dont cinq représentent des partis ou mouvements divers proches du pouvoir en place ou dans l’opposition mais absents du Parlement et quatre indépendants qui vont tenter leur chance sans étiquette définie. Si on greffe à ce puzzle, toutes les minorités qui profitent du rendez-vous présidentiel pour se faire entendre, les Hongrois, les Souabes, les Serbes et les Roms et si on y ajoute une dose d’écologie, de germanophobie ou de nostalgie soviétique, on y perd son latin et son envie de rester. C’est pourquoi des dizaines de milliers de jeunes Roumains fuient leur pays chaque année en espérant, ce qui est dramatique, pouvoir en rester éloignés le plus longtemps possible. Cette diaspora qui prospère comme un champignon aux pluies du printemps va-t-elle se mobiliser le 10 novembre prochain pour aider ses compatriotes restés sur sa terre à sortir de ce guêpier ? C’est la grande inconnue de ce scrutin et il est difficile de savoir si les ressortissants roumains vivant à l’étranger et qui ont contribué à la victoire de Johannis sauront suffisamment se mobiliser pour assurer sa réélection. Rien n’est moins sûr car le bilan du président sortant demeure mitigé. Il a su autant que faire se peut, limiter les abus des hommes politiques les plus corrompus du pays en protégeant la directrice de la DNA, organisme de lutte contre la corruption, mais il n’a pas pu occuper la place que méritait son pays dans les dossiers européens les plus sensibles. Il n’a jamais été fait appel à l’expérience du président roumain dans la crise migratoire alors qu’il est lui-même issue d’une minorité allemande et protestante dans un pays majoritairement catholique-orthodoxe. De tous les membres de l’Union Européenne, la Roumanie est celui où cohabitent le plus grand nombre de minorités et il eût été logique qu’elle apportât son savoir-faire dans le domaine de l’intégration. Klaus Johannis a été par ailleurs victime du double langage de la France sous le mandat de François Hollande. Pendant que le prédécesseur d’Emmanuel Macron prétendait à Bucarest soutenir la Roumanie dans son processus d’intégration dans la zone Schengen, son 1er ministre Manuel Valls considérait, à Paris, que « les Roms ont vocation à revenir en Roumanie ou en Bulgarie ». La campagne aux présidentielles démarre cette année à un moment où le pays est sous le feu de l’actualité à cause d’une nouvelle affaire de corruption qui interdit à la Roumaine Rovana Plumb d’exercer ses fonctions de commissaire européenne en charge des transports. Une bévue dont la nouvelle présidente Ursula von der Leyen se serait bien passée mais qui prouve la longueur du chemin qui reste à parcourir pour que les trois derniers membres de l’Union, Roumanie, Bulgarie et Croatie soient des Européens à part entière. (Source : adz / Traitement en français : vjp)

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