La Roumanie : un foyer d’infections sociales

Roumanie – De tous les pays européens, la Roumanie est celui qui suscite le plus d’interrogations quant à la manière de gérer le crise sanitaire. Il faut rappeler que cette République a le triste privilège de cumuler tous les problèmes. Son gouvernement actuel est une équipe qui travaille en réalité sous une forme intérimaire car son avenir n’est pas garanti. Dans l’ombre des défis sanitaires se profile celle de l’incertitude politique. Il a été imposé aux dix territoires ayant intégré l’Union Européenne en 2005 et 2007, des valeurs et des systèmes occidentaux pour lesquels ils n’étaient pas préparés et encore moins formés. Dans aucun d’entre eux, ne s’est opérée une forme d’épuration qui aurait permis de mettre à mal toutes les mauvaises habitudes enseignées par l’ancien régime communiste.

Un gouvernement intérimaire

Qu’on le veuille ou non, les dirigeants de ces pays ont, quelle que soit leur orientation politique,  une fâcheuse tendance à l’autoritarisme et même lorsque leur principal dirigeant est un démocrate au sens occidental du terme, il est toujours entouré d’une horde de personnes ( ministres, fonctionnaires et hommes de loi)  qui continuent à agir comme si rien n’avait changé. Après avoir été obligés d’imiter les pays de l’ouest pour les rejoindre en temps de paix, ils sont contraints d’en faire de même en temps de crise et c’est pourquoi celle née du coronavirus met à jour toutes les failles de la construction européenne. On s’aperçoit en effet qu’on ne peut pas confiner une population roumaine comme on confine une population française. En France comme en Roumanie, on multiplie les campagnes de dépistage et dans les deux pays on constate que plus on teste, plus augmente le nombre de personnes infestées ce qui est tout à fait logique. Mais, en revanche, si la France a désormais les moyens de se prévenir, grâce à son expérience, de l’éventualité d’une nouvelle vague, le Roumanie ne le peut pas. Dans la République des Carpates le dépistage a focalisé les regards sur trois foyers de contagion à Timisoara, Galatz et Ploiesti, qui ne peuvent être gérés que par le truchement d’unités de soins mobiles dotées de douze lits pour les traitements intensifs ou de réanimation. Une quatrième unité a été prévue en réserve pour la rendre opérationnelle en fonction du développement de la pandémie. Selon Marcel Vela, ministre de l’Intérieur (notre photo), « personne ne doit avoir peur de ne pas être soigné en cas d’infection. Naturellement, a-t-il ajouté, il pourra arriver que certains patients soient déplacés ». Ses administrés ne demandent qu’à le croire mais il n’en demeure pas moins qu’ils découvrent des aberrations dans leur système social. Les plus lucides d’entre eux s’interrogent par exemple à savoir, pourquoi la société de conditionnement de viande de porcs,  Smithfield, a eu recours à des travailleurs vietnamiens dont huit étaient porteurs du virus, ce qui a probablement contribué à sa propagation dans l’entreprise (93 salariés se sont révélés positifs), alors que leurs compatriotes Roms tentent leur chance en occident en travaillant dans des abattoirs français ou allemands ?

L’apport logistique de la diaspora

Une unité de soin mobile ne suffira probablement pas car le coronavirus frappe dans des lieux où on ne l’attendait pas, comme par exemple, dans la petite ville  de Fatschet (6.700 habitants) où un foyer d’infection s’est déclaré lors d’un baptême organisé à l’occasion de l’ouverture d’une nouvelle paroisse protestante. A l’instar de ce qui se produit dans de nombreux autre pays européens, il n’est pas rare que ce soient les communes qui prennent les initiatives les plus rationnelles pour lutter contre la propagation du virus. Et lorsqu’elles sont épaulées par les membres de la diaspora roumaine, elles peuvent donner des résultats encourageants. Près de 800.000 Roumains vivaient l’an dernier en Allemagne qui a toujours été une terre d’accueil. C’est ainsi qu’on dénombre en RFA plusieurs dizaines d’associations germano-roumaines qui contribuent à une valorisation réciproque des deux pays au niveau culturel, social et économique. Une crise comme celle vécue à l’heure actuelle permet de redynamiser une nouvelle forme de jumelage, moins politique mais plus efficace car initiée par la société civile. A Pforzheim, par exemple, la DRG (Deutsch-Rumänische- Gesellschaft), présidée par Oana Krichbaum (notre photo),  a lancé une campagne de financement participatif, dont la collecte, en générant 3.000 euros, a permis la livraison de 10.000 masques ainsi que des gels désinfectants. Cette jeune Roumaine, épouse de Gunther Krichbaum, membre du Bundestag, a joué un rôle de premier plan lorsqu’un plan d’urgence a été mis en place pour encadrer la quarantaine imposée aux abattoirs Müller-Fleisch de Birkenfeld, où travaillaient bon nombre de ses compatriotes, dont beaucoup ne maîtrisaient par suffisamment l’Allemand pour comprendre les consignes de sécurité.  Les accords conclus hier à Bruxelles, bien que portant sur un volume revu à la baisse, devraient largement profiter à la Roumanie qui s’inscrivait déjà, lorsqu’il était question de 750 milliards, parmi les cinq pays d’Europe Centrale destinés à bénéficier des plus gros transferts proportionnellement à leur PIB 2020 évalué par la Commission Européenne. Il était prévu que Bucarest perçoive 19,6 milliards d’euros, une somme à priori colossale mais qui n’est toutefois pas suffisante pour corriger tous les handicaps auxquels le pays est confronté. Quel que soit le tournant que prendra la pandémie, il est clair que ce n’est pas encore la veille qu’il supportera la comparaison avec un territoire d’Europe Occidentale. Les Roumains sont priés de croiser les doigts pour que des initiatives civiles à l’instar de celle de la DRG se multiplient.(Source : adz / Adaptation et synthèse en français : pg5i/vp)

Notre prochain article : les Bucarestois meurent davantage de pollution que de maladies

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