Corona, bananes et cocaïne

Allemagne/UE – Contrainte de faire respecter les mesures destinées à l’éradication de la pandémie, le police allemande se voit confrontée à des actes de grande délinquance dont le pays semblait jusque là épargné. Le terrain de prédilection des malfrats les plus doués et les mieux organisés demeure Berlin, où des holdups dignes des plus célèbres séries hollywoodiennes font régulièrement la une des journaux à grand tirage qui se régalent autant des faits que de l’incapacité de la police à y mettre un terme. En ce mois de décembre, en l’espace de trois jours, une ou plusieurs bandes organisée(s)  a ou ont pris en otages deux véhicules de transport de fonds, dont le second à la sortie d’un magasin Ikéa. Bien que le nombre de transactions par carte bleue ne cesse d’augmenter, beaucoup d’Allemands privilégient toujours les paiements en espèces, généralement lorsqu’il s’agit d’achats inférieurs à cinquante ou cent euros. Bien informés, les habiles  observateurs que sont  les auteurs de ces actes  agissent en toute hâte en des lieux porteurs d’espoir et de liquidités dont il est facile de s’éloigner avant que les signaux d’alarme ne retentissent. Lorsque les uniformes arrivent sur place, les délinquants ont déjà pris la poudre d’escampette, à toute vitesse bien que chargés de sacs contenant au bas chiffre plusieurs centaines de milliers d’euros. Ces faits se déroulent généralement en plein jour à la vue de passants dont les témoignages ne servent à rien car les numéros d’immatriculation qu’ils ont éventuellement eu le temps  de noter sont ceux d’une plaque trafiquée fixée sur la carrosserie d’une grosse cylindrée volée quelques jours auparavant. Le braquage le plus spectaculaire s’est déroulé dans un centre commercial du quartier berlinois de Treptow, où,  selon les témoins, trois individus ont fait main basse en quelques minutes sur un pactole estimé à 220.000 euros. La zone a été évacuée en urgence car la police s’imaginait qu’au moins un des membres du trio était encore sur place. Cet espoir déçu, décision a été alors prise de barrer toutes les rues du quartier mais là encore ces efforts, encadrés par la crème de la crème de la Bundespolizei, le GSG9, pendant allemand du raid français, ont été vains. Les autorités s’interrogent toujours à savoir s’il s’agit d’une ou de plusieurs bandes organisées Les méthodes ont en effet beau être comparables, cela ne signifie pas pour autant qu’il puisse en être de même pour les motivations. Il n’est pas impossible que la crise sanitaire, en détournant les forces de l’ordre de leur vocation sécuritaire ait sinon agrégé du moins inspiré des groupuscules liés au proxénétisme, au trafic de substances illicites ou au terrorisme. Jamais, avant la pandémie la capitale fédérale n’avait vécu autant de « gros coups » en l’espace d’aussi peu de temps et parfois au même endroit, à l’instar de cette banque située dans la rue de Wilmersdorf qui a été victime  d’un assaut à deux reprises les 16 juin et 4 août derniers. Le montant du premier butin s’est élevé à un demi-million d’euros et pour le second aucune annonce n’a été rendue publique.

Patient hospitalisé en urgence après une overdose

Nouvelles Républiques bananières

Mais du manque de vigilance consécutif à la pandémie, les cambrioleurs et les initiateurs zélés de casses à haut risque ne sont pas les seuls à tenter d’en profiter et Berlin n’est pas l’unique ville à en récolter les fruits. Hambourg, en tant que troisième plus grand port maritime européen après Rotterdam et Anvers, n’échappe pas à la règle et ce, notamment, dans le trafic à grande échelle de cocaïne. Dans la ville hanséatique qui, depuis 1189 tire sa richesse du transit et du commerce de marchandises, les saisies de drogue sont fréquentes mais celle qui a été effectuée le 15 décembre dernier a prouvé à quel point la consommation de cocaïne semble s’être popularisée. C’est en perquisitionnant dans trente-huit maisons et appartements non seulement à Hambourg mais aussi dans les lands du Schleswig-Holstein, de Brème et de Basse-Saxe qu’à  pu être démantelé un vaste réseau international ayant contribué à écouler plusieurs centaines de kilos de cocaïne. Sur les vingt personnes interpellées, quinze, âgées de 18 à 58 ans, ont été placées en détention provisoire mais les enquêteurs sont déjà convaincus qu’il ne s’agit là que de la partie visible de l’iceberg, car le réseau en question est actif dans d’autres ports, aussi bien aux Pays-Bas qu’en Angleterre. Le 15 décembre ce ne sont pas moins de deux tonnes de cocaïne qui ont été découvertes dans des containers censés contenir des bananes. Ce fruit très consommé en Europe et plus particulièrement dans les pays nordiques dont chaque habitant en mange plus de dix kilos par an, fait l’objet d’une grande vigilance des douaniers dans les ports d’arrivée ce qui  semble ne pas être possible pour des raisons qu’il est facile de comprendre, dans ceux du départ. Que la pandémie ait mis fins aux petits trafics de rue, à la vente de quelques grammes de haschich ou à l’écoulement de quelques cartouches de cigarettes à trois ou cinq euros le paquet est une évidence  mais qu’elle ait encouragé le commerce à grande échelle de produits hautement toxiques et dévastateurs est également une réalité. Lorsque le moment sera venu de dresser un bilan réel du coronavirus, il ne faudra  pas retenir que le nombre de décès enregistrés dans les Ehpad, mais aussi celui des jeunes gens morts par overdose après avoir rêvé, confinés, d’un avenir meilleur. kb & vjp

 

 

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