Biélorussie : amorce insolite d’un dialogue de… sourds (?)

Biélorussie/Russie – Que le Président biélorusse ait pris l’initiative de renouer le dialogue avec ses opposants, n’a pas manqué de surprendre les observateurs mais aussi les premiers concernés, en l’occurrence les milliers de manifestants qui avaient spontanément envahi les rues, avant et après les élections du 9 août dernier. Alexander Lukaschenko s’est rendu personnellement dans la prison pour y rencontrer ceux qu’il avait fait incarcérer et avec lesquels il s’est entretenu pendant plus de quatre heures et demie. Le plus emblématique d’entre eux fut naturellement Viktor Babariko (notre photo) qui aurait été en lice au scrutin présidentiel de l’été dernier, s’il n’avait pas été arrêté avec son fils tous deux envoyés derrière les barreaux pour  des suspicions de fraudes fiscales. Cet ancien banquier, depuis 1995 président de la Belgazprombank, était le seul candidat crédible susceptible de succéder à celui que la presse internationale assimile au dernier dictateur en fonction en Europe. Une image délétère que le « président à vie », a voulu briser en déclarant sans complexe que son pays a toujours été « connu pour sa capacité à résoudre les problèmes par le dialogue ». De quels sujets se sont entretenus les participants à cette « table ronde » pour le moins singulière que l’un des principaux opposants au régime, Pawel Latuschko, ancien ambassadeur de Biélorussie en Pologne a qualifié d’« absurde » ?  Personne, à l’extérieur de la prison,  ne le sait avec exactitude mais en revanche tout le monde a eu connaissance qu’une réforme de la constitution avait été évoquée. Dans ce genre de contexte, la prudence est de mise et on ne peut qu’avancer quelques hypothèses, comme le fait le journaliste et chroniqueur Alexander Morosov, un spécialiste des relations de la Biélorussie avec le Kremlin en tant qu’ancien rédacteur en chef du « Russischer Journal ». Selon ce commentateur, une chose est certaine, Lukaschenko ,n’a pas encore pris totalement conscience qu’il ne pourra avoir raison des protestataires à l’usure, alors même que, pour la première fois depuis son accession au pouvoir, la rébellion touche toutes les couches de la société, y compris une partie de celles qu’il a protégées. Il se trouve actuellement dans une position délicate entre deux feux : soit il exacerbe, seul, la répression  mais il prend alors le risque de voir se retourner contre lui une partie de la police, de l’armée et ses services secrets peu encline à agir contre une population civile constituée majoritairement de femmes et de mères de famille, soit il réprime avec l’aide de la Russie, ce qui signifierait alors la perte de souveraineté de son pays. Le meilleur scénario pour Lukaschenko, selon A.Morosov,  serait qu’il accepte l’organisation de nouvelles élections libres et réellement démocratiques et qu’il profite de ce nouveau scrutin   pour créer, avec ses troupes, son propre parti politique dont il resterait le porte-parole au Parlement. S’il choisissait cette troisième option, l’homme condamnable pour son obstination deviendrait un homme respectable pour sa lucidité. C’est beaucoup demander à une personne dont tout le monde se moque, car il ne sait parler correctement ni le russe, ni le biélorusse. (Source : dekoder / Adaptation en français : pg5i / vjp)  Nombre de mots : 530

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