Allemagne : un Président qui multiplie les bévues

Allemagne/Ukraine – Il était prévu que le Président de la République allemande, Frank-Walter Steinmeier (notre photo), se rende ce jeudi 20 octobre en Ukraine pour y rencontrer le Président Volodymyr Zelensky mais il a pris la décision d’annuler au dernier moment ce voyage en prétextant des raisons de sécurité. Ce comportement du président allemand a d’autant plus choqué ses compatriotes que bon nombre de chefs d’Etat se rendent à Kiev pour y rencontrer leur homologue ukrainien sans se soucier des risques qu’ils prennent. Ce même jeudi Volodymyr Zelensky a pu rencontrer le président suisse qui est reparti sain et sauf dans son pays. Les raisons invoqués par Steinmeier ne sont pas prises au sérieux par la majorité des observateurs au premier rang desquels Johannes Wiedemann, éditorialiste politique au sein du quotidien Die Welt. Selon ce dernier, Frank-Walter Steinmeier « n’était déjà pas du tout souhaité à Kiev au printemps à cause de sa contribution à l’implication de l’Allemagne en Russie du temps où il était chef de la Chancellerie et ministre des Affaires Etrangères social-démocrate. » Le rôle du Président de la République allemande aurait dû consister à se rendre le plus rapidement possible en Ukraine pour réparer les dégâts causés par une trop forte connivence entre Berlin et Moscou. « Même après cinq ans ans et demi, le plus haut représentant protocolaire de la République Fédérale d’Allemagne ne semble pas avoir développé le sens de la dignité dans l’exercice de ses fonctions » assène Wiedemann avant de rappeler la même ambiguïté de Steinmeier à l’égard de l’Iran. En 2019, le Président allemand a appelé Téhéran à mettre fin à la violence contre les mouvements de protestation au moment même où il envoyait un télégramme de félicitations à l’occasion du 40ième anniversaire de la Révolution Islamique ! Pour réparer cette erreur, Steinmeier avait voulu renoncer un an plus tard à un message de félicitation à l’occasion de la fête nationale iranienne, lequel a été envoyé par erreur à Téhéran. Mais ce ne sont là que deux des impairs commis par le Président de la République au cours de ces dernières années. La plus choquante de ses bévues a consisté à se faire photographier et filmer sans masque au plus fort de la pandémie au moment même où les autorités sanitaires mettaient tout en œuvre pour l’éradiquer. « A une époque où la politique conduisait à des mouvements de détachement inquiétants de la démocratie, cet incident a été une négligence incompréhensible » estime Wiedemann qui n’hésite pas à en rajouter une couche cinglante à l’égard d’un homme dont « la seule marque de fabrique semble être des discours dominicaux sans relief » et qui « n’a guère marqué de son empreinte les débats de société et encore moins les avoir lancés. »

Construit dans les années 1785-1786 par l’architecte Michael Philipp Boumann sur ordre du prince prussien August Ferdinand le château de Bellevue, situé entre la Spree et la colonne de la Victoire a été gravement endommagé par les bombardements de la 2ième guerre mondiale. Son extérieur a été reconstruit à l’identique entre 1954 et 1959. Cet édifice a accompagné toute l’Histoire de l’Allemagne. Certaines de ses ailes ont servi de musée et d’autres de cantines populaires. Il n’est utilisé qu’épisodiquement, notamment à l’occasion de visites de chefs d’Etat.
C’est dans la Villa Wurmbach, située dans le quartier de Dahlem, le plus cossu de la capitale, que vivent depuis 2044 les Présidents de la République d’Allemagne. Cet édifice appartenait jusqu’à l’arrivée des nationaux-socialistes au pouvoir, à un riche entrepreneur juif, Hugo Heymann, décédé en 1938 après avoir été torturé par la gestapo. La Villa Wurmbach est toujours entourée de mystères tant sur son histoire que sur ceux qui ont été amenés à l’occuper. En 2020, elle a fait l’objet d’un ouvrage « Die Villa in der Pücklerstrasse » qui éclaire sur la façon dont le régime en place dans les années 30 est parvenu à faire main basse sur le patrimoine des familles les plus fortunées.

« L’intendant de Bellevue »

Bien qu’elle ne soit qu’honorifique, la fonction de Président de la République revêt en Allemagne une importance particulière car elle est le meilleur moyen pour le pays de redorer son image à l’étranger. Quelle que soit la formation politique à laquelle il a appartenu, il est choisi pour représenter la Nation toute entière et le moindre de ses faux-pas peut être à tout moment unanimement condamné.

Pour le 28 octobre prochain, Frank-Walter Steinmeier, partant pour un second mandat (jusqu’en 2027) a annoncé un discours intitulé « Renforcer tout ce qui nous unit ». Il serait bien venu, selon l’éditorialiste de Die Welt, « qu’à cette occasion il parvienne à offrir une orientation à la population en cette période de crise la plus grave de l’Allemagne d’après-guerre. Mais il serait irréaliste d’attendre précisément cela d’un homme qui, ces cinq dernières années, a plutôt donné l’impression d’être l’intendant de Bellevue. Frank-Walter Steinmeier n’est pas l’homme qu’il faut à la plus haute fonction de l’Etat. »

 

 

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