Allemagne : le virus renforce la coalition au pouvoir

Allemagne/France – Les différences entre la France et l’Allemagne qui sont actuellement mises à jour par la propagation du coronavirus, ne concernent pas seulement la gestion de la crise sanitaire mais de plus en plus la configuration politique. Alors que les dirigeants de la première commencent à subir les critiques de l’opposition et plus particulièrement de la France Insoumise, l’exécutif de la seconde peut s’appuyer sur une population qui adhère majoritairement aux mesures qu’il a adoptées. Alors qu’en France, il est de tradition de ne donner que cent jours à un nouveau gouvernement pour faire ses preuves, en Allemagne, lorsque les conditions l’imposent, le chef de gouvernement peut tenir quinze ans !

Alors que la France brille par la multiplicité de ses gouvernements qui ne cessent d’être remaniés, l’Allemagne laisse à ses Chanceliers le temps de s’affirmer. Si la République Fédérale est devenue la puissance économique qu’elle est aujourd’hui, c’est parce que ses élites ont toujours pu assumer une politique du compromis. Faut-il rappeler que le 1er Chancelier, Konrad Adenauer, est resté quatorze ans au pouvoir, de 1949 à 1963, et que sur cette période les Français ont vu défiler à Matignon, dix-huit 1er ministres. L’arrivée du Général de Gaulle et la proclamation de la 5ième République ont conduit à une stabilité et une continuité présidentielle sans empêcher une versatilité gouvernementale. Un seul 1er ministre, François Fillon, est demeuré en fonction pendant toute la durée d’un mandat présidentiel et entre Michel Debré et Edouard Philippe, ce ne sont pas moins de dix-huit chefs de gouvernement qui se sont succédé à l’avant sommet du pouvoir. Beaucoup ont mené des politiques contradictoires. Les Allemands ont vu les Français nationaliser puis reprivatiser leurs fleurons industriels, assisté à l’arrivée de ministres communistes à un moment où le régime soviétique commençait, en Pologne, à vaciller et s’ils ont réussi la réunification, c’est parce qu’en trente ans le parti du Chancelier n’a jamais gouverné seul mais toujours avec une force d’appoint, le parti libéral sous Helmut Kohl, la formation des Verts sous Gerhard Schröder et le parti social démocrate sous Angela Merkel. La force de la Chancelière allemande est d’avoir su gouverner dans des conditions souvent difficiles avec un parti historiquement son rival. Avec la crise du coronavirus, elle récolte les fruits mûris par onze années de collaboration avec le Parti Social Démocrate, entre 2005 et 2009 puis à partir de 2013 jusqu’à ce jour. La grande différence entre la France et l’Allemagne vient du fait que sur la rive droite du Rhin, on ne gouverne jamais seul. Il est par conséquent beaucoup plus aisé à Berlin de recueillir une approbation majoritaire qu’à Paris. Contestée dans son propre camp pour sa politique d’accueil des migrants, elle est aujourd’hui reconnue comme une visionnaire d’une part parce qu’il est avéré que les réfugiés ne sont pas responsables de la pandémie et d’autre part parce que cet afflux de population devient indispensable au maintien de l’économie. La Chancelière a coupé court à tous les discours des populistes et le parti AfD voit sa cote de popularité chuté de semaine en semaine. Selon les dernières études d’opinion, il ne recueillerait que 7 à 8% des suffrages, si des élections au Bundestag avaient lieu demain, alors qu’il était crédité de 15 à 16% avant la crise sanitaire. Le SPD a gagné un point à 16% ce qui permet à la coalition au pouvoir de compter sur une large majorité, proche des 60%. vjp

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